Fabricateurs d'espaces
Retour sur l'exposition

Vincent Lamouroux, Evariste Richer, 
Michael Sailstorfer*

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Vincent Lamouroux, AR. 07, 2008

Médium, enduit, peinture acrylique
Dimensions variables
Collection IAC, Villeurbanne/Rhône-Alpes
Vue de l'exposition Fabricateurs d’espaces, du 17 octobre 2008 au 4 janvier 2009, Institut d'art contemporain, Villeurbanne/Rhône-Alpes.
© photo Blaise Adilon


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Evariste Richer, Les Sondes, 2006

3 sondes d'avalanche
Dimensions : dorée : 265 cm ; noire : 240 cm ; argentée : 320 cm
Courtesy Galerie schleicher+lange, Paris
Collection privée
Vue de l'exposition Fabricateurs d’espaces, du 17 octobre 2008 au 4 janvier 2009, Institut d'art contemporain, Villeurbanne/Rhône-Alpes.
© photo Blaise Adilon

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Michael Sailstorfer, Unendliche Säule, 2006

Projecteur
Dimensions : 85 x 100 cm
Courtesy Galerie Johann König, Berlin
Vue de l'exposition Fabricateurs d’espaces, du 17 octobre 2008 au 4 janvier 2009, Institut d'art contemporain, Villeurbanne/Rhône-Alpes.
© photo Blaise Adilon


Vincent Lamouroux, Evariste Richer ou Michael Sailstorfer travaillent l’espace comme matériau à part entière. En le sondant, le contraignant, l’outrepassant, ils parviennent à générer une variation de celui-ci : espace corporel, espace architectural, espace sidéral. S’affranchissant de l’héritage de la sculpture pour en étendre la pratique, ces trois artistes, présentés dans le cadre de l’exposition Fabricateurs d’espaces, font interagir l’espace avec la matérialité de leurs productions en provoquant alors une immatérialité paradoxale.

Leurs sculptures spatiales nous amènent à parcourir d’autres territoires – qu’il s’agisse d’ici ou d’ailleurs, intérieur comme extérieur, des profondeurs de la terre à l’amplitude cosmique – et, ce faisant, à appréhender l’espace tout entier. Par un même geste, nous sentons que c’est bien le même espace qui nous traverse de toute part.

Ces artistes se saisissent justement de cette réalité imperceptible : ils jouent avec ce qui n’a pas de mesure en s’évertuant à lui en donner une. Si les codifications standards ont perdu de leur évidence, cela a ouvert la voie à la création de nouvelles règles spatiales, à la limite de l’absurde. Chaque mouvement, chaque objet, chaque errance, devient une possible quantification d'un espace-temps à présent élastique. C’était l’objet de l’exposition Dimensions variables qui, à la manière de stanley brouwn – figure historique de l’art conceptuel – voulait rendre compte du lien entre l’échelle humaine et l’échelle cosmique.

* Sélection parmis les artistes de l'exposition Fabricateurs d'espaces : Björn Dahlem, Jeppe Hein, Vincent Lamouroux, Guillaume Leblon, Rita McBride, Evariste Richer, Michael Sailstorfer, Hans Schabus

micro Labo

Découvre, explore et expérimente !


Les artistes de Fabricateurs d’espaces ont cherché à mesurer l’espace par d’autres moyens que les instruments de mesure traditionnels. Toi aussi, fais le plan d’un lieu à la manière d’un architecte, en utilisant ta propre taille comme repère.
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macro Labo

Si nous ne pouvons expérimenter ces œuvres face à l’écran, il reste possible d’en capter à distance l’espace mental. Chacune, en effet, nous projette à sa manière dans des espaces que l’on ne peut percevoir, nous forçant à imaginer, par mouvements inversés, l’environnement qui nous traverse.

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Evariste Richer, Les Sondes, 2006

3 sondes d'avalanche
Dimensions : dorée : 265 cm ; noire : 240 cm ; argentée : 320 cm
Courtesy Galerie schleicher+lange, Paris
Collection privée

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Michael Sailstorfer, Unendliche Säule, 2006

Projecteur
Dimensions : 85 x 100 cm
Courtesy Galerie Johann König, Berlin
Vue de l'exposition Fabricateurs d’espaces, du 17 octobre 2008 au 4 janvier 2009, Institut d'art contemporain, Villeurbanne/Rhône-Alpes.
© photo Blaise Adilon


Semblant sortir des murs, l’œuvre de Vincent Lamouroux apparaît doublement impossible : territoire d’en bas, on accède à ses formes moléculaires, amoncellement de cubes blancs enchevêtrés inspirés du film Voyage au centre de la Terre de Henry Levin (1960), en descendant quelques marches ; territoire d’en haut, l’AR.07 (2008) renvoie au droit aérien (Air Right¹), c'est-à-dire à ces parcelles d’air au-dessus des gratte-ciels qu'il est possible d'acheter quand le sol vient à manquer.

C’est sous la terre que nous plonge encore Evariste Richer, en nous confrontant à la disparition de notre propre espace par l'évocation de corps disparus sous la neige : comme des bâtons d'aveugle, ses Sondes (2006) d’avalanche graduées aux couleurs des alchimistes – or, argenté et noir – deviennent des outils d'investigation pour mesurer l’impalpable.

Avec Unendliche Säule, le regard se lève vers le ciel : cette colonne sans fin transperce la verrière de l’IAC et s’étire, sans limites nettes, dans les lointains. Michael Sailstorfer établit un lien « à dimension variable » du spectateur au ciel en ramenant au sol les 5000 mètres de hauteur que le flux lumineux est censé parcourir. 

Par ces juxtapositions du haut et bas, proche et lointain, imaginaire et vécu, ces artistes « tentent de trouver une voie nouvelle qui consiste à retenir de la nature les forces pour l’essentiel invisibles qui existent en elle et à faire des murs non une limite ou un obstacle mais une sorte d’appareil de mesure permettant de rendre compte de l’existence de ces forces² ». Ce sont ces puissances qui, nous traversant autant qu’elles traversent le monde, font tomber les limites antérieures. L’espace mental et physique des « fabricateurs d’espaces » rend manifeste l’espace global, infiniment plus large, où nous nous tenons comme point de vue singulier au sein d’un faisceau de relations multiples : dans un monde cosmomorphe.

¹ Un concept légal issu de la Rome antique : cuius est solum, eius est usque ad caelum et ad inferos [quiconque est propriétaire d’un lopin de terre la détient du paradis à l’enfer].

² Jean-Louis Poitevin, « Percept « pur » et genèse de l'espace », in : Fabricateurs d'espaces, catalogue d'exposition. Dijon : Les presses du réel, 2011, p. 47.

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« La relation à l’œuvre serait une expérience peu différente de celle que l’on vit dans la relation à notre environnement, sauf que l’art nous permet d’expérimenter des mondes qui n’ont pas encore cours. »

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Station 2
L’espace à la croisée de l’astrophysique et des neurosciences

Fabricateurs d'espaces


Dimensions variables

Vincent Lamouroux

Vincent Lamouroux élabore une œuvre nourrie de formes minimales, d'utopies modernistes déchues et de cultures populaires (science-fiction, sport de glisse...). L'intérêt de l'artiste pour l'architecture coexiste avec son désir de produire des formes dynamiques portées par le mouvement et la possibilité du déplacement. Inscrites fermement dans l'espace, elles s'offrent à l'expérience bien plus qu'à la lecture « traditionnelle » et jouent sur la perte des repères et la réévaluation d'une réalité donnée. Ainsi, elles allient le mouvement des corps et celui de l'imaginaire.

Evariste Richer

Evariste Richer s'attache à produire une œuvre sensible aux tentatives de compréhension du monde. Cet intérêt chaque fois réaffirmé l'amène à porter son regard, non pas directement sur les mécanismes de l'univers mais sur ceux qui président à l'exercice de sa connaissance ou de sa reconstitution. Se saisissant des outils des sciences et de la culture, il délimite un territoire d'intervention paradoxalement rigoureux et décalé qui s'appréhende comme une expérimentation.

Michael Sailstorfer

Alimenté par une constante recherche de la matière en tant qu’énergie, le travail de l’artiste allemand Michael Sailstorfer met en œuvre des actions de transformation, de déconstruction et de reconstruction et se confronte aux espaces intermédiaires, transitoires, aux non-lieux, zones que l’on parcourt inconsciemment avant d’atteindre une destination. Outre la conscience politique qu’il peut contenir, le travail de Michael Sailstorfer marque l’espace d’exposition d’une puissance énergétique qui cherche à provoquer chez le visiteur une forte expérience de perception spatiale.

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